DES REFORMES.
Écrit par Aldo SARCIAUX le 12 mars 2025
C’est par un amendement de Patrick Galenon que le projet de loi du gouvernement visant à simplifier certaines dispositions du code du travail a finalement reçu un avis défavorable du Cesec. Sur la forme, pas de souci. Mais ces modifications peuvent aussi avoir un “impact sur le fond” alertent les syndicats de salariés qui demandent au gouvernement de revoir sa copie. La société civile voit surtout dans ce texte une façon de pallier le manque d’effectifs à la Direction du travail sans régler le problème pour autant.
“Le projet de texte se confine à quelques modifications relatives aux missions de l’inspection du travail, et ne s’étend ni aux autres services du Pays, ni n’apporte toutes les réponses attendues par le monde économique et social. Tel est l’avis du Cesec sur le projet de loi portant modification du code du travail.” Voilà comment était rédigé initialement cet avis étudié ce mercredi matin en séance plénière. Un “ni oui ni non” comme souvent au sein de la quatrième institution du Pays. Et pour cause : deux camps se sont affrontés pendant les débats, avec d’un côté les représentants des organisations patronales, et de l’autre les syndicats de salariés ; le patron de CSTP-FO Patrick Galenon en tête.
Et c’est lui qui a donc proposé un amendement pour que le Cesec tranche et émette un avis défavorable. Une demande notamment appuyée par Atonia Teriinohorai (O oe to oe rima) et par la rapporteure du texte Vaitea Le Gayic (CSIP) qui estime que “le fait de pouvoir émettre un avis défavorable va pousser le gouvernement à revenir à la table des discussions et aller sur le fond”. Pourquoi ?
Une “simplification excessive”
Si les simplifications proposées partent d’un bon sentiment en ayant pour ambition d’alléger les démarches administratives qui pèsent sur la Direction du travail et les entreprises, elles peuvent influer sur l’équilibre des relations entre employeurs et salariés. C’est du moins l’argument avancé par Patrick Galenon dans son amendement, expliquant qu’une “simplification excessive risque d’amoindrir certaines garanties protectrices pour les travailleurs, en supprimant certaines obligations de l’employeur ou en réduisant les moyens de contrôle et d’information à la Direction du travail”.
Ce texte propose ainsi de supprimer ou de réduire le nombre de transmissions de documents à la Direction du travail quand ce n’est pas indispensable, comme le règlement intérieur d’une entreprise, ou encore les “éléments de nature à justifier l’inégalité de rémunération entre les femmes et les hommes en cas de litige” qui ne seront plus fourmis, le tribunal du travail étant compétent en la matière.
“Tout n’est pas à jeter à la poubelle”
Ce dernier point a d’ailleurs fait beaucoup débat au Cesec, Patrick Galenon étant vent debout contre cette disposition : “C’est la bataille que nous menons tous les jours, ça ne doit plus exister ! Et rien que pour ça, je suis défavorable au texte”, a-t-il claqué avant de proposer son amendement voté par 19 voix, 12 s’étant abstenus et 13 ayant voté contre parmi lesquels les représentants des employeurs. Pour Thierry Mosser (Medef), Jean-François Benhamza (Sipof) et Mere Trouillet (FGC), ce texte va dans le bon sens même s’il mériterait d’être étendu à d’autres services du Pays : “tout n’est pas à jeter à la poubelle”. Christophe Plée était absent mais la CPME est un peu plus réservée, estimant, comme c’est d’ailleurs écrit noir sur blanc dans l’avis, que cette simplification du code du travail est “induite par un manque d’effectifs de la Direction du travail”.
En effet, la Direction du travail ne dispose que d’un seul inspecteur aujourd’hui alors qu’il lui en faudrait huit. Même punition pour les contrôleurs qui se comptent sur les doigts d’une main : ils sont cinq alors que le besoin estimé par la Direction du travail est de onze. “Comment vous pouvez contrôler 35 000 entreprises et 70 000 salariés dans ces conditions ?” a fustigé le patron de la CSTP-FO rejoint par Joël Carillo (Sdiraf) qui estime lui aussi qu’à force de “trop simplifier, on arrive à des aberrations”. Il faut recruter. Point.
Pousser le gouvernement à revoir sa copie
Pour Vaitea Le Gayic, ce “toilettage du code du travail est très important” et ne pose pas de problème sur la forme. Mais sur le fond, “il y a des choses à rediscuter et à revoir”, car la Direction du travail se déleste de compétences pour simplifier les procédures, mais, ce faisant, elle ne garantit plus les protections essentielles des travailleurs. Qu’il s’agisse des litiges relatifs à l’inégalité de rémunération entre les femmes et les hommes, du travail par relais et par roulement, de la constitution des syndicats professionnels, des horaires individualisés ou encore des accords d’entreprise, il ne serait désormais plus nécessaire de faire appel à un inspecteur du travail.
“On sait que les employeurs sollicitent cette simplification. Mais parfois, nous trouvons que les salariés sont sous l’emprise de l’employeur, et qu’ils n’ont pas de moyens de se défendre et nous pensons que l’inspection du travail reste un moyen très important de médiation”, justifie ainsi la conseillère du Cesec. Le texte devra maintenant passer par l’assemblée de la Polynésie, et malgré cet avis défavorable, il devrait être adopté sans problèm